Un samedi pluvieux de novembre 2025, j’ai croisé dans une librairie de quartier l’une des dernières éditions papier de 60 Millions de Consommateurs. La responsable, Anna, le tenait entre ses mains comme un témoin précieux d’un temps où, face à la grande distribution ou aux géants de la tech, nous avions au moins une vigie indépendante. Ce jour-là, la nouvelle faisait déjà frémir : la liquidation de l’INC et la vente du magazine s’apprêtaient à rebattre les cartes de la protection des consommateurs. Pourquoi cette décision du Sénat déclenche-t-elle autant de colère ? Et que risque-t-on, au fond, en laissant filer un demi-siècle d’irrévérence critique au profit d’acteurs privés ?
Imaginez : un magazine public où l’on testait en toute liberté la fiabilité d’un smartphone ou la transparence d’un yaourt, désormais relayé à de vieux souvenirs, remplacé par une Une plus consensuelle, rythmée par les impératifs financiers de nouveaux actionnaires. Le débat est vif, et ce n’est pas un hasard.
Liquidation de 60 Millions de Consommateurs : l’impact d’une décision très politique
La liquidation, officielle depuis le vote du Sénat mi-novembre via l’article 71 du budget 2026, suscite un vif émoi dans les rangs citoyens. D’abord parce qu’elle met fin à une justice pour les consommateurs, celle d’un magazine jamais soumis à la tentation publicitaire ou au poids des lobbies.
Vous vous demandez peut-être si tout cela n’est qu’un choix économique ? Le gouvernement avance la « situation financière dégradée » de l’INC. Mais l’opération interroge : pour mettre la clé sous la porte, il faudra débourser entre 8 et 10 millions d’euros selon les estimations, alors que le budget d’une année pleine tournait encore autour de 11,6 millions d’euros. Résultat : une polémique sur le sens, et l’efficacité, de cette dépense publique.

Quand la protection des consommateurs entre en turbulence : un tremplin pour le secteur privé ?
Ce basculement du public au privé fait planer un doute. J’ai discuté avec Paul, technicien dans un service après-vente, grand lecteur de 60 Millions. Pour lui, « demain, si le magazine appartient à un grand groupe, qui va encore oser révéler les failles des smartphones ou pointer du doigt les travers de la grande distribution ? ».
L’inquiétude n’est pas isolée. Selon plusieurs experts, la privatisation d’un titre dont la mission était la protection des consommateurs pourrait laminer un demi-siècle d’indépendance. On se souvient encore d’enquêtes phares, comme celle de 2025 qui révélait la meilleure fiabilité des modèles Xiaomi et Honor face à la domination d’Apple. Difficile d’imaginer la même audace éditoriale dans un contexte privé, où l’annonceur prend le pas sur l’enquêteur.
Colère et mobilisation : la justice des droits face à la polémique politique
Ce qui frappe dans cette affaire, c’est le large front commun de soutien à 60 Millions de Consommateurs. Élise Lucet, Olivia Grégoire, Serge Hercberg… Leurs voix s’entremêlent pour dénoncer ce qu’ils considèrent comme une « asphyxie organisée ». On a assisté à une mobilisation inédite, mêlant journalistes d’investigation, universitaires et responsables politiques de tous bords.
Cette solidarité n’est pas anodine. Elle souligne une question centrale : qui, demain, défendra l’intérêt général dans un paysage médiatique saturé des intérêts financiers ? Sur le terrain, la disparition d’un titre indépendant ramène à la crainte de voir nos droits de consommateurs moins protégés, moins visibles, et finalement relégués derrière d’autres priorités économiques.
Liste des points clés révélateurs du malaise économique et social
- La baisse progressive des subventions : de 6,3 millions d’euros en 2012 à 2,7 millions en 2020, symbolise un désengagement politique assumé.
- Un coût de liquidation contesté : jusqu’à 10 millions d’euros dépensés pour clore l’INC, soit près d’une année d’activité.
- Une expertise réduite au silence : le magazine n’hésitait pas à publier des enquêtes dérangeantes, comme l’a prouvé sa dernière étude sur la fiabilité des smartphones.
- Un risque de perte de confiance citoyenne : la crédibilité d’un média indépendant ne se restaure pas facilement.
Quand la justice pour les consommateurs rencontre l’impact économique
Ce basculement laisse un goût amer, alimenté par la sensation d’un combat inabouti. Pour Paul, Anna, et tant d’autres, le vrai dommage réside dans la menace qui pèse sur l’indépendance de la protection des consommateurs. À l’heure où le numérique s’immisce partout, où chaque achat engage nos données et notre santé, qui osera encore dénoncer l’obsolescence programmée sans crainte de voir ses financements coupés ?
Cette histoire en rappelle d’autres. Comme ce football tourangeau qui, lui aussi, traverse une période de grands bouleversements, ou encore ces liquidations éclair dans la tech qui, malgré le vernis d’innovation, posent les mêmes questions sur la justice sociale et l’accès égal aux protections essentielles.
La colère n’est donc pas qu’un spasme passager. Elle cristallise une attente de justice et de vigilance collective, dans un monde où chaque acte d’achat pourrait impacter l’ensemble de nos droits – et où l’on comprend, une fois de plus, que les arbitrages économiques ne sont jamais neutres.
Envie d’explorer d’autres dossiers engagés ? Retrouvez sur l-echo.info des enquêtes sur les liquidations du secteur technologique et découvrez comment les clubs sportifs locaux se réinventent face à la crise. Partagez votre témoignage : comment ressentez-vous ce bouleversement ? Vos avis comptent – et peuvent ouvrir de nouvelles perspectives, pour ne pas abandonner la justice des consommateurs à l’ombre des salles de marchés.
