J’ai vu Aaron Levie monter sur la scène de TechCrunch Disrupt et redessiner, en quelques images claires, l’avenir du logiciel d’entreprise. Le patron de Box n’y voit pas la fin du SaaS, mais une recomposition : le cœur des processus reste géré par des plateformes déterministes, tandis que des agents IA viennent s’y greffer pour accélérer les usages et multiplier les « utilisateurs » du système. C’est une vue à la fois optimiste et exigeante pour la sécurité et le modèle économique.
Aaron Levie (Box) : pourquoi les agents IA vont cohabiter avec le SaaS d’entreprise
Sur scène, Levie a insisté sur la nécessité d’une séparation claire entre les briques décisionnelles stables et la couche intelligente. Selon lui, pour les tâches « mission critical », on garde des systèmes déterministes pour limiter les risques opérationnels — fuite de données ou actions inattendues en production.
J’ai entendu cet argument se répercuter chez des éditeurs comme ServiceNow, Zendesk ou Workday, qui gèrent des workflows sensibles et ne peuvent se permettre d’exposer des opérations vitales à un modèle non déterministe. L’idée est simple : le SaaS reste le flux principal, les agents viennent comme une surcouche d’accélération. C’est un équilibre à préserver.
Insight : la coexistence entre logique métier statique et agents adaptatifs s’annonce comme la règle, pas l’exception.
Réinterpréter la tarification SaaS : du « par siège » à la facturation à la consommation d’agents
Levie a souligné un changement financier majeur : il anticipe « 100x à 1 000x » plus d’agents que d’utilisateurs humains, ce qui rendra obsolète le modèle par siège. Les entreprises devront vendre des modèles basés sur la consommation ou le volume d’usage des agents.
Cette transition ouvre la porte à des startups capables de concevoir des expériences « agent-first » et à des modèles de facturation nouveaux — à l’image de sociétés émergentes qui expérimentent la facturation à la performance. Des acteurs d’infrastructure réfléchissent déjà à qui paiera pour ces agents : Cloudflare évoque la facturation des robots IA qui consomment des contenus, un signal fort pour l’écosystème (lire).
Insight : adapter la monétisation au volume d’agents impose aux éditeurs une refonte complète de leurs contrats et de leur comptabilité produit.
Après la vision stratégique, viennent les risques. Le spectre des fuites et des erreurs alimentées par des agents a déjà fait la une et alerte les régulateurs. En Europe comme en Californie, la discussion sur des cadres contraignants progresse — la Californie propose une loi sur la sécurité de l’IA qui vise à encadrer ces usages, illustration de la montée de la conformité comme facteur clé (détails).
Parallèlement, des autorités techniques tirent la sonnette d’alarme sur les impacts de l’IA générative pour la neutralité du net et la santé des écosystèmes web — un élément à garder en tête pour les éditeurs d’outils comme Google Workspace, Slack ou Dropbox qui distribuent du contenu et du contexte (lire).
Insight : régulation et sécurité vont déterminer qui pourra déployer des agents à grande échelle dans les entreprises.
Startups, opportunité : construire l’agent-first plutôt que greffer l’IA sur l’existant
Levie a rappelé que les petites équipes ont l’avantage : elles n’héritent pas de processus lourds et peuvent imaginer des flux conçus dès l’origine pour les agents. J’ai rencontré l’exemple fictif de Claire, DSI d’une PME industrielle, qui préfère piloter un projet pilote avec une startup agent-first plutôt qu’adapter son ERP lourd.
Ce contexte alimente des levées et des créations : certaines jeunes pousses attirent des financements pour intégrer l’IA dans des secteurs comme l’assurance ou la gestion documentaire — voir la levée de 50 millions d’un acteur français cherchant à intégrer l’IA dans les coulisses de l’assurance (lire). D’autres expérimentent des modèles de facturation centrés sur les résultats, un indice d’adaptation à venir (exemple).
Insight : la fenêtre de création pour de nouveaux leaders est ouverte — les startups qui s’emparent du sujet peuvent définir les standards.
Sur le terrain, l’adoption passera par la gestion du changement et la confiance des équipes. Les incidents rapportés par des observateurs de la Silicon Valley ont déjà alimenté la prudence des DSI, renforçant la demande pour des outils de gouvernance et d’audit (analyse).
Par ailleurs, le glissement vers des agents massifs pose des questions économiques pour les éditeurs historiques — Salesforce, Microsoft, Atlassian ou d’autres devront choisir entre transformer leurs offres ou s’ouvrir à un écosystème d’extensions facturées à l’usage. Les tendances de trafic et de consommation de contenu modifient déjà la valeur des interfaces et des résumés automatiques (contexte).
Insight : gouvernance, observabilité et modèles économiques seront les trois clefs de la réussite pour les acteurs historiques et les nouveaux entrants.
